LA CHINE A LA RECHERCHE DE TALENTS FINANCIERS
2007-09-20 00:00

Par Xu Bo (China Features)

   "Quand j'y arriverai, je pourrai acheter une BMW Série 7 pour dot de mariage", affirme Jian Jingtao, 22 ans, un sourire éclatant sur le visage. "Je l'offrirai à mon fiancé pour lui montrer à quel point je l'aime."

   La BMW Série 7 la moins chère coûte environ un million de yuans alors que le revenu annuel des habitants des villes n'était en moyenne que de 12 000 yuans en 2006.

   Jian Jingtao, fonctionnaire de la province du Sichuan en Chine du sud-ouest, touche à peu près 1 200 yuans par mois en tant que météorologiste à temps partiel, dans une chaîne de télévision de la préfecture autonome Yi de Liangshan, une région pauvre du Sichuan, où la plupart des habitants n'ont jamais entendu parler de BMW.

   Alors comment peut-elle réaliser son rêve? Eh bien, au lieu de compter sur son travail à temps partiel, elle a d'autres idées.

   "Je suis en train de préparer le test CFA (analyste financier agréé) et j'ai déjà passé le niveau II", explique t-elle, les yeux plein d'espoir. "Encore un dernier pas pour entrer dans les meilleures institutions financières!" Obtenir un travail dans une telle institution signifie pour elle s'approcher de son rêve de voiture idéale.

   Selon les statistiques officielles, le personnel des institutions financières réputées gagne 15 000 yuans par mois et même plus. Poussés par le principe fondamental de l'économie -- l'offre et la demande -- les emplois du secteur financier sont très demandés.

   Quelque 45 millions de personnes rejoindront le marché du travail d'ici cinq ans en Chine, mais beaucoup d'entre eux travailleront comme manoeuvres ou ouvriers de construction et ne toucheront que 800 yuans par mois.

   Lors d'un discours prononcé à l'Université de Qinghua, une des universités les plus prestigieuses de la Chine, le président de la Banque de Construction de Chine (BCC), Guo Shuqing, a affirmé que le problème le plus gênant auquel fait face la BCC dans sa stratégie d'"implantation à l'étranger" est le manque de talents.

   La BCC, l'une des quatre plus grandes banques commerciales de la Chine, envisage d'établir des succursales à New York et à Londres, a révélé Guo, ajoutant que sa banque "recherchait fortement les personnes spécialisées en comptabilité financière, analyse financière, gestion de portefeuille, établissement des prix du taux d'intérêt et des devises étrangères.

   La Chine, l'une des économies qui enregistre le plus fort taux de croissance au monde avec une hausse du PIB d'environ 10% au cours des dix dernières années, a longtemps été considérée comme une usine mondiale. Prenons un exemple, quelque 75% des appareils ménagers du monde sont produits en Chine.

   Comme le pays passe à un système financier de plus en plus orienté vers le marché, les talents financiers sont très précieux.

   Pour calmer les plaintes contre les prix très faibles des produits exportés depuis la Chine, le pays a mis fin à l'indexation de sa monnaie, le yuan, sur le dollar américain en juillet 2005 et a raccordé le yuan à un panier de devises étrangères, autorisant une marge de fluctuation de 0,3% autour de la parité centrale officielle.

   "Tout a changé quand on a élargi la marge de fluctuation à 0,5%", affirme le marchand de textile Wei Changshan de la compagnie Dongxing Textile Co., basée à Beijing, "Je voudrais bien embaucher quelqu'un qui est capable de me dire comment faire".

   En juillet 2005, 8,28 yuans pouvaient s'échanger contre un dollar. Le 10 juillet 2007, un dollar équivalait à 7,58 yuans.

   Prêtant l'oreille aux commentaires étrangers, Yi Gang, assistant du gouverneur de la Banque populaire de Chine, a déclaré que le taux de change du RMB pourrait être de plus en plus flexible.

   En ce qui concerne le marché boursier, l'indice de la Bourse de Shanghai a fait un bond de plus de 130% en 2006 en glissement annuel après un marché à la baisse depuis cinq ans, grâce à la réforme des réglementations boursières et à la forte croissance économique.

   Le marché boursier de la Chine pourrait dépasser celui de l'Australie pour devenir le troisième plus grand d'Asie à la fin de l'année prochaine, selon une prévision réalisée en janvier par le vice-président de la Bourse de Shanghai Zhou Qinye.

   Avec la mise en application des nouvelles réglementations concernant les investissements étrangers, les gestionnaires de fonds et les marchands de titres souhaitent l'emporter sur leurs concurrents étrangers et la question de la pénurie en talents financiers revient.

   Un récent document gouvernemental sur les investisseurs institutionnels nationaux qualifiés (QDII) permet aux compagnies de gestion de fonds et des titres du pays de suivre les banques commerciales pour descendre dans l'arène des bourses étrangères.

   "Nous avons commencé les préparatifs pour les produits de QDII il y a six mois", a indiqué Xu Xiaosong, vice-directeur général de China Southern Fund Management Co. Ltd.

   "Nous sommes donc à la recherche de personnel qualifié. Malheureusement, nous ne sommes pas les seuls. De nombreuses sociétés de Bourse sont comme nous", selon un gestionnaire de fonds, qui préfère rester anonyme. "C'est simple. Si nous voulons sortir vainqueur de la compétition, nous avons besoin de la meilleure équipe".

   Il n'est pas surprenant que les banques étrangères cherchent aussi des personnes qualifiées. En 2005, la Banque d'Asie de l'Est a ouvert en premier des services aux particuliers en Chine.

   En marge du Dialogue économique stratégique sino-américain tenu en mai, la Chine a autorisé les banques étrangères à émettre leurs propres cartes de crédit et de débit en yuans.

   Cette mesure est considérée comme un moyen de promouvoir la compétition équitable entre les institutions financières locales et étrangères.

   Lors de la 3e Conférence nationale sur le travail financier organisée début 2007, le Premier ministre chinois Wen Jiabao a dit que la Chine pourrait faciliter la compétition équitable entre les institutions financières locales et étrangères.

   Alors que le gouvernement chinois ouvre le secteur bancaire afin de tenir les engagements faits auprès de l'Organisation mondiale du commerce, la bataille pour les ressources humaines dans le secteur financier fait rage.

   HSBC souhaite accroître son personnel de 3 000 à 4 000 en Chine cette année alors que Citigroup envisage d'embaucher encore 1 000 autres employés. Standard Chartered a déclaré qu'elle n'avait pas d'objectif spécifique pour cette année mais a recruté 1 000 personnes en 2006.

   Le problème le plus ardu auquel font face les banques est la recherche de personnel expérimenté à la formation adéquate, a souligné le chef de l'exécutif de HSBC China, Richard Yorke.

   "On ne donne pas réellement d'éducation financière dans les universités chinoises," a fait remarquer Wang Zhao, économiste du Centre pour les recherches économiques de l'Université de Beijing.

   "Ce qu'on appelle éducation financière à l'université ce sont les mesures de contrôle macro-économique, telle que la politique monétaire, comme aux anciens jours de l'économie planifiée. Ce que les étudiants chinois attendent, ce sont des cours d'analyse boursière ainsi que de gestion de portefeuille", d'après lui.

   Une récente enquête internationale publiée par Deloitte Consulting montre que 2/3 des 636 hauts responsables financiers interrogés pensent que l'offre des talents de haute qualité en Asie est très limitée et inadaptée.

   "Le point crucial et délicat c'est que tu dois maîtriser les pratiques internationales aussi bien que la réalité locale", selon le directeur de gestion d'Asia Pacific Operations CFA Institute, Jane Squires.

   Si vous composez 800-820-5555, le téléphone rouge de China Merchants Bank (CMB) vous dira que les détenteurs de carte de crédit doivent signaler la perte de leur carte dans les 48 heures.

   Si vous le faites à temps et que l'enquête prouve que les transferts frauduleux ont eu lieu durant ces 48 heures, la banque remboursera un maximum de 10 000 yuans pour les cartes de crédit ordinaires.

   "Cela veut dire que je dois vérifier ma carte presque tous les jours et que je risque d'être fauché parce que je n'ai jamais vu un vendeur vérifier vraiment la signature", selon un détenteur de carte de crédit de CMB, Liu Chao.

   "Ils me disent qu'ils n'utilisent pas les transactions avec un mot de passe car la vérification de signature est une pratique standard internationale. Mon dieu, c'est la Chine."

   La Chine a exposé les grandes lignes de ses nouvelles politiques pour son industrie financière lors de la 3e Conférence nationale sur le travail financier tenue début 2007, portant sur le renforcement de la réforme des banques d'Etat, l'accélération des réformes financières dans les régions rurales et l'approfondissement stable de la réforme du régime du taux de change.

   Le secteur financier du pays sera plus dynamique, avec une ouverture continue du marché.

   "Cette année, 10 200 personnes se sont inscrites au test CFA en Chine, en hausse de 30% par rapport à l'année dernière", a révélé Squires. "Nous pouvons prévoir raisonnablement qu'il y aura 600 détenteurs de CFA de plus à la fin de 2007".

   "Je ne peux dire le nombre exact d'experts financiers dont la Chine a besoin mais une chose est certaine, c'est qu'il y a toujours assez de places pour les personnes compétentes. Les Etats-Unis comptent actuellement 44 220 détenteurs de CFA, en comparaison avec 3 650 à Hong Kong, 2 133 à Singapour et seulement 1 086 en Chine", a-t-elle poursuivi.

   La jeune Jian Jingtao, pleine de qualités typiquement chinoises, a de belles chances de réaliser son rêve ainsi que le rêve de son chanceux petit ami, probablement avec l'aide d'un crédit bancaire.

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