LA CHINE RENFORCE SON CONTROLE SUR L'UTILISATION DES TERRES POUR ASSURER SA SECURITE ALIMENTAIRE
2007-09-20 00:00

Par Zhao Wei, Qiu Lihua (China Features)

   Face à l'expansion de l'urbanisation et à la construction de nouvelles usines qui nécessitent de plus en plus de terres, le gouvernement chinois s'efforce d'appliquer les mesures politiques de contrôle les plus strictes sur l'utilisation de terres et d'élever l'efficacité de leur utilisation, afin d'assurer la sécurité alimentaire du pays.

   La Chine, qui nourrit 22% de la population mondiale avec seulement 10% des terres agricoles du monde, doit axer sa politique foncière sur la restriction des expropriations terriennes pour des projets de construction et sur l'utilisation plus efficace des terres agricoles existantes, a affirmé Wang Xiaoguang, économiste à la Commission d'Etat pour le Développement et la Réforme.

   Avec une population devant atteindre 1,4 milliard d'habitants d'ici trois ans, le gouvernement chinois avait fixé en 2006 une superficie plancher des terres agricoles du pays de 120 millions d'hectares, limite en dessous de laquelle il est interdit d'aller sous aucune circonstance, une telle superficie étant considérée comme le minimum nécessaire pour nourrir toute la population chinoise.

   L'un des moyens de résoudre le problème est de persuader les agriculteurs d'utiliser plus efficacement leurs terres, a dit Wang.

    Ma Youming s'est installé dans un nouvel appartement avec sa femme et son fils il y a six mois. "Je ne suis plus un agriculteur aujourd'hui et je travaille dans une entreprise. La plupart des gens de mon village ont monté leurs petites affaires ou travaillent comme salariés".  

   Ma, âgé de 42 ans, a indiqué que son village Xinchang, dans la ville de Taizhou de la province orientale du Zhejiang, comptait 250 familles avec un total de 875 personnes, vivant autrefois dans un environnement insalubre et désordonné.  

   Mais une fois devenus riches, les villageois se sont rendus compte qu'il n'y avait plus assez de terres pour qu'ils construisent de nouvelles maisons.

   Ils ont donc invité des professeurs de l'Université du Zhejiang à Hangzhou, capitale de la province, à les aider à élaborer un nouveau plan de développement d'urbanisme. En 2003, le plan a été mis au point avec notamment une zone résidentielle pour les villageois, une autre pour les services publics et le reste pour la production agricole.

   Yu Zheng, chef du village, a indiqué que grâce à ce nouveau plan d'urbanisme, la surface de logements par tête d'habitant au village s'est étendue à 82 m2, contre 37 m2 auparavant. "Il nous reste aussi des terres pour le développement commercial. Nous avons construit des magasins d'une surface totale des planchers de 2 500 m2 et nous allons construire un immeuble de bureaux de 19 étages destiné à être loué.

      Les revenus collectifs du village se sont élevés en 2006 à 1,5 million de yuans (200 000 dollars us) et devraient atteindre quelque 2,5 millions de yuans (330 000 dollars us) en 2007, a dit Yu.

      Ma Youming s'est dit satisfait de son nouvel appartement. "Nous n'avons pas besoin de payer les frais de gestion immobilière des logements ni ceux destinés à l'entretien des arbres et du gazon, parce qu'ils sont tous payés par le village", a-t-il dit.

      Yu a souligné que la planification scientifique et l'utilisation efficace des ressources limitées de terres avaient transformé la vie des habitants.

      Selon un rapport de l'Institut de recherche du Développement et de la Réforme du Zhejiang, les maisons dans les régions rurales de la province occupent des terres de façon irrationnelle. Si les terres pour les habitations étaient utilisées de façon plus efficace et plus rationnelle, au moins 100 000 hectares de terres pourraient être convertis en terres agricoles, ce qui représente 5,7 fois la superficie des terres affectées aux projets de construction dans l'ensemble de la province en 2006.

   Selon des experts des problèmes ruraux, vivre de façon décentralisée dans les campagnes est en Chine une tradition plusieurs fois millénaire, qui a entraîné l'utilisation de vastes terres agricoles et qui n'est plus adaptée aux conditions de la Chine moderne. Une campagne intitulée "Echangez votre maison contre un appartement", lancée actuellement dans  les régions côtières économiquement développées du pays, devrait économiser 40% des terres utilisées pour les habitations, réduisant la menace pesant sur les terres agricoles et favorisant l'augmentation de la consommation chez les agriculteurs.

    Cependant, ont indiqué les experts, cette campagne pour loger les agriculteurs dans des appartements se déroule actuellement de façon satisfaisante uniquement dans les régions côtières et les banlieues des grandes et moyennes agglomérations, où les secteurs manufacturier et des services sont florissants. Par contre, elle a encore de grandes difficultés à être mise en oeuvre dans les régions de l'ouest du pays, encore sous-développées sur le plan économique.

    Les autorités de la province du Fujian (est) ont pris à coeur le thème de la "Journée nationale de la Terre" du 25 juin dernier -- "Utilisation efficace des terres pour préserver les terres agricoles". Elles ont proposé aux habitants ruraux des plans de logements de 15 styles architecturaux différents, qui sont adaptés aux conditions climatiques, géologiques et économiques du sud de la Chine, ainsi qu'aux modes de vie des régions côtières et montagneuses de la province.

    Les autorités du Fujian ont ainsi distribué ces plans à quelque 100 000 familles rurales de la province et aidé 37 000 familles à construire des logements satisfaisants et peu consommateurs de terres.

   L'efficacité de l'utilisation des terres ne concerne pas uniquement les êtres humains et de nouvelles fermes d'élevage ont été construites pour préserver des terres agricoles.

   La Xinling Farming and Animal Husbandry Co. à Jinjiang dans la province du Fujian a construit trois bâtiments de cinq étages destinés à l'élevage de 2 000 porcs chacun. Les femelles passent leur période de grosesse au 4ème étage et descendent au 3ème étage pour donner naissance aux porcelets, qui, après le sevrage, sont nourris au même étage, avant de prendre l'ascenseur pour descendre dans les trois étages en dessous pour y être élevés.

   Le gouvernement a en outre renforcé le contrôle sur le commerce illégal de terres pour éviter l'occupation de davantage de terres agricoles.

   Les efforts du gouvernement ont commencé à porter leurs fruits. Selon le ministère du Territoire et des Ressources naturelles, la Chine comptait 122 millions d'hectares de terres agricoles en 2006, soit une baisse de 307 000 hectares (-0,25%) par rapport à 2005. Cependant, 367 000 hectares de terres ont été reconvertis en terres agricoles, soit une superficie supérieure de 42% à celle des terres expropriées pour les projets de construction l'année dernière.

   La population chinoise, forte de 1,3 milliard de personnes, a besoin approximativement de 500 millions de tonnes de céréales par an, soit plus de 300 kg par tête et par an. En 2006, la production céréalière du pays s'est élevée à 490 millions de tonnes, ce qui signifie que 122 millions d'hectares de terres agricoles suffisent tout juste à nourrir 1,3 milliard de personnes.

    "La production céréalière doit augmenter en même temps avec la croissance démographique, et la Chine ne peut plus se permettre de diminuer la superficie de ses terres agricoles", a dit Chen Qizhou, directeur du Centre de recherche dépendant du ministère du Territoire et des Ressources naturelles.

    Chen a indiqué que la population chinoise devrait atteindre 1,4 milliard d'habitants vers 2010 et que la superficie de 120 000 hectares de terres agricoles était un minimum ne pouvant être réduit.

      Pour améliorer la gestion des terres, la Chine a lancé son second recensement national des terres qui devra être achevé en 2009. Elle a aussi adopté la Loi sur la propriété, qui assure une protection spéciale des terres agricoles et restreint strictement les expropriations des terres agricoles à des fins de construction.

      La construction de villas, terrains de golf et centres de formation pour les institutions gouvernementales et les entreprises d'Etat a été interdite, au moins provisoirement.

      En avril dernier, la Commission d'Etat pour le Développement et la Réforme, le ministère du Territoire et des Ressources naturelles et le ministère de la Construction ont publié une circulaire conjointe sur les projets de zones de développement, qui indique que le nombre des zones de développement a diminué de 6 866 auparavant à 1 568 et que les projets de création de nouvelles  zones économiques au niveau provincial ne seront plus approuvés par les autorités centrales. La publication de cette circulaire a pour but d'endiguer la mauvaise utilisation des terres dans les zones de développement non conformes aux normes.  

      En même temps, le gouvernement chinois met en place un système centralisé de supervision des terres à l'échelle nationale, tout en créant 9 bureaux régionaux.

      Selon le ministère du Territoire et des Ressources naturelles, par rapport à 2005, moins de terres ont été approuvées pour des projets de construction en 2006, mais 131 077 cas d'utilisation illégale de terres ont été découverts dans l'ensemble du pays, en hausse de 17,3% en base annuelle, tandis que ces cas ont porté sur quelque 100 000 hectares de terres, en hausse de 76,7%, y compris 43 000 hectares de terres agricoles.

      Des observateurs ont indiqué que malgré l'établissement de mesures politiques pour le contrôle de l'utilisation des terres, l'obsession des gouvernements locaux pour la croissance du PIB, la mauvaise application de ces mesures politiques et les sanctions trop légères contre les auteurs de violations de lois ont favorisé l'augmentation des infractions.

      Zou Yuchuan, membre du Comité national de la Conférence consultative politique du Peuple chinois, a indiqué que l'utilisation et la protection des terres ne figurent pas dans les critères d'évaluation des officiels locaux, qui, en conséquence, n'hésitent pas, au détriment de la préservation des terres, à "accomplir des performances" pour obtenir des promotions dans leur carrière politique.    

      Des experts ont proposé d'amender la loi actuelle sur la gestion des terres, afin de restreindre le pouvoir des gouvernements locaux dans l'approbation des projets d'utilisation de terres, et d'instaurer un système efficace de responsabilité.

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